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Vues sur la renaissance des Etudiants Socialistes en 1927

Image Hasard des brocantes : le GERME a pu acquérir, en octobre 2002, ce lot de correspondance égaré dans une cave ou un grenier resté anonyme ... Alain Monchablon nous le présente.

Les douze courriers qui sont reproduits ici, s'échelonnant entre la fin de 1926 et le début de 1928, donnent un aperçu intéressant sur la difficile renaissance de l'organisation des étudiants socialistes à partir de 1927. Tardivement constituée, la fédération des Etudiants socialistes avait disparu au moment du congrès de Tours (1920) qui avait vu la scission de la SFIO et par là de ses organisations de jeunesse. Depuis, nul n'avait songé à reconstituer une telle organisation avant 1924. Le congrès fondateur de la nouvelle organisation doit se tenir au printemps 1927.

Il faut dire que le contexte n'était alors guère favorable à des organisations étudiantes de gauche. Les courriers y font d'ailleurs allusion, aussi bien celui daté du 21 décembre 1926, qui note que l'Action Française à l'Université de Lille est "diablement forte", que celui émanant de Clermont-Ferrand, le 19 février 1927, qui évoque le risque pour une organisation de gauche de "faire impunément assommer ses adhérents dans la bibliothèque de la faculté de droit", ce à quoi fait d'ailleurs écho Simone de Beauvoir (Mémoires d'une jeune fille rangée) qui évoque - pour la même période - une expédition punitive du même ordre menée par l'extrême droite dans la bibliothèque de la Sorbonne.

La reconstruction d'une Fédération nationale des étudiants socialistes (FNES) est l'oeuvre de normaliens de la rue d'Ulm, donc de parisiens, au moins d'adoption. Le groupe parisien a été en effet le premier à se reconstituer et à tenter ensuite de monter des groupes en province, ce qui fournit la matière de l'essentiel des courriers ici reproduits. Parmi les initiateurs parisiens, on trouve les noms de Georges Lefranc, futur dirigeant du centre d'éducation ouvrière de la CGT et historien du mouvement ouvrier, de Maurice Deixonne, qui fut sous la IVe République président du groupe parlementaire SFIO -ce dernier est d'ailleurs la cheville ouvrière de l'opération et le principal destinataire des correspondances- ainsi que de Claude Lévy, futur maire d'Orléans.

On note l'inexpérience des étudiants français, ce qui les amène à se tourner vers leurs camarades belges, beaucoup plus avancés, qui leur fournissent d'utiles conseils, et même l'hospitalité dans leurs périodiques, L'Eveil, puis Le drapeau rouge. Les rapports avec les camarades socialistes allemands sont beaucoup plus incertains (cf courrier correspondant).

A observer aussi la réticence persistante des responsables adultes du Parti Socialiste. Dans sa première lettre à G. Lefranc, le maire de Lille, Roger Salengro, évoque son expérience négative de militant du Groupe des Etudiants Collectivistes avant 1914, avant de présenter au contraire (deuxième lettre, vingt mois plus tard) la naissance d'un groupement lillois. Le secrétaire national de la SFIO lui-même, Paul Faure, ne répond à l'initiative de Deixonne que par un sec rappel à la discipline statutaire, sans le moindre encouragement. Il est vrai qu'allusivement, c'est la question de la coexistence d'une organisation d'Etudiants Socialistes avec d'autres qui est posée; c'est à dire la question de la LAURS.

La Ligue d'Action Universitaire Républicaine et Socialiste (LAURS) est apparue en 1924, en réaction contre la domination de la rue, et d'abord de celles du Quartier Latin, par l'extrême droite étudiante. Se voulant unitaire, elle est pourtant considérée comme une émanation du Parti Radical, même si son dirigeant principal en 1927, Pierre Mendes France, lui-même membre du Parti radical, en affirme l'autonomie. Précisément, son premier congrès, après trois ans d'existence, doit lui aussi se tenir au printemps 1927. On comprend la situation de concurrence qui oppose l'organisation socialiste à la LAURS et les positions diverses qui s'expriment dans les courriers présentés : à Clermont-Ferrand, les ES sont parfaitement à l'aise dans la section LAURS, puisqu'ils la dirigent, alors qu'à Grenoble il y a "défense de parler socialisme". Situation confuse, qui sera tranchée quelques années plus tard par les ES reconstitués.

Encore les courriers reproduits ne font-ils pas mention d'une autre organisation étudiante de gauche existant alors, l'UFE , Union fédérale des étudiants, qui posera aux ES d'autres difficultés de conscience.

Ainsi recommençait l'existence, à l'avenir tourmenté, de la Fédération nationale des étudiants socialistes.

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